Brazil est un film britannique de science-fiction réalisé par Terry Gilliam, sorti en 1985.
Genèse de Brazil
La séquence d'ouverture de quinze minutes du film «Le Sens de la vie» , satire brillante sur un groupe de vieux fonctionnaires qui déclenchent une mutinerie contre leurs superviseurs, de l'ex Monty Python, Terry Gilliam, réalise un préambule à son film culte: Brazil. Baroque, postmoderne, néo-expressionniste, Brazil brosse un univers sombre, oppressant et fourmillant de détails que l'on retrouve dans d'autres œuvres du réalisateur telles que «Bandits», «Jabberwocky» ou encore «L'Armée des douze singes».
Le titre
Contrairement à ce que son titre pourrait laisser supposer, le film ne montre pas de lien direct et explicite avec le Brésil. Il s'agirait toutefois du pays de provenance de l'insecte brouillant les pistes entre Buttle et Tuttle à son début. L'idée originale de la séquence d'ouverture consistait à suivre le vol d'un insecte à partir d'une forêt brésilienne rasée par d'énormes scies mécaniques, avant de finir écrasé sur le mur d'un bureau du Ministère de l'Information (M.O.I.), entraînant la réaction en chaîne kafkaïenne que nous connaissons. Cette scène compliquée a dû être abandonnée par Gilliam afin de respecter son budget.
Voici l'explication de Gilliam : «La première idée de Brazil, c'est une image. Je faisais du repérage au pays de Galles en vue du tournage de Jabberwocky, et je visitais une petite ville industrielle avec des aciéries. Une ville horrible dans une région minière. La plage était complètement noire, à cause de la poussière de charbon. C'était tellement noir qu'on se serait cru à la tombée de la nuit. Je suis allé sur la plage, une sorte de décharge publique, et j'ai vu un homme assis seul, avec un transistor, passant d'une station à l'autre et tombant par hasard sur le thème «Brazil» [de Ary Barroso]. Un rythme semblable n'existe pas dans son monde. De toute sa vie, cet homme n'avait jamais écouté une musique pareille, entraînante, romantique, gaie, syncopée et évocatrice d'évasion latine, suggérant qu'au-delà des tours d'aciers et des gratte-ciel se trouve un monde luxuriant et paisible. Parce que cette musique l'obsède, elle change sa vie. Pour cette raison, je tenais à ce que le titre du film soit celui de cette chanson. »
L’idée fondatrice
« De prime abord, raconte Gilliam, Brazil s'intéresse à un fonctionnaire sans histoire, Sam Lowry, qui travaille au sein d'une énorme machine bureaucratique, le Ministère de l'Information, dont il devient rapidement la victime. C'est aussi l'histoire de quelqu'un qui ne prend pas la réalité au sérieux et qui perd trop de temps à rêver. »
Les références et influences du film
1984, de George Orwell : durant l'année 1984, un véritable déluge d'articles, livres, entrevues et discours ont été voués aux visées prophétiques de George Orwell et de son classique littéraire, écrit en 1948. Dans ce contexte, il n'était pas surprenant de voir une seconde adaptation cinématographique, signée Michael Radford, prendre l'affiche.
«Ils ont fait une grosse erreur avec 1984, affirme Gilliam. Nous y sommes en 1984, et ce qu'ils nous montrent n'a strictement rien à voir avec la réalité que nous vivons aujourd'hui. En fait, ils auraient dû appeler ça 1984 ½ ! J'ai eu peur qu'ils fassent la même chose que nous. Brazil est sur aujourd'hui, 1984 sur 1948. Ce qui m'ennuie dans le film de Radford, c'est que la technologie est absurde. Celle de Brazil ne fonctionne peut-être pas, mais elle correspond à l'époque et a une signification. »
Ainsi, Brazil se présente-t-il comme une admirable interprétation postmoderne des visées prophétiques de George Orwell. On y retrouve l'aspect dictatorial d'un empire bureaucratique auquel Sam Lowry, personnage principal, se trouve confronté. Alors qu'il se révolte progressivement contre le système — ce qui se traduit par le réalisme et la brutalité de plus en plus exacerbée de ses rêves —, il suit la trace de la femme qui le hante, Jill, qui se révèle être un personnage plutôt insoumis et irrévérencieux. C'est cette quête de la réalité qui éloignera Sam de l'illusoire ambition bureaucratique et lui opposera une prise de conscience et de recul dans la découverte de choses simples et fondamentales.
À l'instar de 1984, Brazil aborde donc la problématique de la responsabilité individuelle dans un système totalitaire. La réplique lancée par l'ami tortionnaire de Sam Lowry, «Ne rends pas les choses plus compliquées que ce qu'elles sont», est à ce sujet fort éloquente. L'atmosphère générale qui se dégage du film qui prête souvent à sourire, vu l'absurdité des situations montrées et le jeu des acteurs (par exemple, l'intervention des plombiers des Services centraux, ou celle de Harry Tuttle) , est toutefois très différente de celle du livre. Alors que le 1984 de Radford suit de très près la veine littéraire d'Orwell, Brazil prend des libertés, des distances, et laisse entrevoir d'autres influences.
Même si le style de Gilliam est hautement personnel et maîtrisé, l'influence de ses pairs, parmi lesquels les incontournables Eisenstein, Kurosawa, Hitchcock et Kubrick, n'est pas absente au sein de son œuvre. Également influencé par d'autres formes artistiques, Brazil emprunte en littérature aux Franz Kafka, Frank Capra, Walter Mitty, Jonathan Swift et Jules Verne, empiétant également du côté de la peinture avec les Dali, Brueghel, Bosch, Magritte, Escher, Rembrandt et même Tenniel, l'illustrateur de Alice au Pays des Merveilles.
Pieter Brueghel l'Ancien : les tableaux du célèbre peintre flamand ont grandement influencé Gilliam dans la conception esthétique de Brazil. «La peinture abstraite, affirme le réalisateur, est devenue quelque chose qui traite de la peinture, comme une sorte de maniérisme. Alors que l'art traite de la vie et du réel, l'abstrait ne traite de rien. C'est pourquoi j'aime Brueghel : il y a tant d'humanité dans chacun de ses détails. Chaque personnage est unique et fait quelque chose de particulier. Le tableau peut avoir pour sujet un grand événement, comme la Crucifixion, mais à l'arrière-plan, il y a toujours quelqu'un faisant quelque chose. Il y a plus de vie là-dedans que dans des rectangles et des carrés. Regarder la réalité est plus intéressant. »
Don Quichotte de Cervantes : particulièrement par le symbolisme utilisé lors des séquences de combat oniriques de Sam Lowry, et plus généralement dans sa quête de plus en plus fervente d'un rêve perdu au milieu d'un monde gouverné par la bureaucratie. Gilliam tentera une adaptation cinématographique de cette œuvre quinze ans plus tard.
Ce qui se passa sur le pont de Owl Creek, d'Ambrose Bierce : le cerveau de Sam Lowry se réfugiant dans ses songes pour se protéger de la torture, il s'imagine être sauvé par son bienfaiteur Tuttle. Le phénomène n'est pas sans rappeler celui décrit dans la célèbre nouvelle «Ce qui se passa sur le pont de Owl Creek» d'Ambrose Bierce, où un homme condamné à la pendaison trouve dans le rêve une occasion de s'évader. Dans Brazil, cette scène devient un pivot narratif important, faisant converger le récit vers une conclusion troublante, dans laquelle rêve et réalité se confondent dans une extraordinaire maîtrise de la mise en scène.
Le Procès de Kafka : au même titre que la plupart des films de Terry Gilliam, Brazil traite, par une richesse de tons parfois déstabilisante (mêlant poésie, cynisme et humour absurde), de l'intimité du rapport entre le rêve et la réalité, ici mis en exergue par celui de l'individu face au système. C'est pourquoi il est aussi possible de rapprocher Brazil du Procès de Kafka, notamment par l'absurdité progressive des situations opposant Sam Lowry à un ordre apparaissant comme à la fois insolite et terrifiant. On peut également noter de nombreuses similitudes, tant dans l'esthétique et les motifs que dans les techniques employées, entre Brazil et Le Procès, film d'Orson Welles adapté du Procès de Kafka.
Le Cuirassé Potemkine, de S. M. Eisenstein : lorsque Tuttle et Lowry tentent de s'enfuir du Ministère de l'Information, Gilliam en profite pour faire allusion à la fameuse tuerie du Cuirassé Potemkine, un appel viscéral à la révolte contre l'autorité. Dans cette scène, un aspirateur est substitué au landau du bébé, les troupes de force descendent les marches du M.O.I. comme les soldats du Potemkine celles d'Odessa, puis une femme reçoit un projectile en plein centre de ses lunettes, sans qu'aucun son ne sorte de sa bouche, le réalisateur faisant ainsi appel à un silence vocal bien caractéristique des débuts du cinéma, totalement justifié dans le contexte de cette scène.
Metropolis, de Fritz Lang : les décors de Brazil — qui n'ont pas échappé à l'influence de ceux d'Otto Hunte dans Metropolis — comportent une structure tubulaire omniprésente. «Je suis obsédé par les viscères, mécaniques ou organiques, et j'ai toujours été fasciné par le fonctionnement interne des choses, précise Gilliam. J'aime cette idée que " Central Services " comble tous nos besoins, et que chacun accepte de voir cette structure envahir sa demeure pour avoir accès à ses services. »
Le Triomphe de la volonté, de Leni Riefenstahl : dès l'ouverture de son film, Terry Gilliam nous situe : « 8 h 49. Quelque part dans le vingtième siècle... », indication superposée sur un ciel nuageux dans lequel « flotte » littéralement la caméra, allusion au célèbre film de propagande de Leni Riefenstahl.
Les Sept Samouraïs, d'Akira Kurosawa : dans la version européenne du film, la séquence du samouraï se déroule en continuité en une longue séquence a contrario de la version américaine divisée en trois parties distinctes. Le samouraï est une référence, un hommage indirect à Akira Kurosawa, un des maîtres de Gilliam, et aussi un clin d'œil ironique à la haute technologie qui provient souvent du Japon.
Les Sentiers de la gloire, de Stanley Kubrick : l'une des scènes clés du film s'ouvre sur un impressionnant mouvement de caméra dans le lieu de travail de Sam Lowry, où virevoltent dossiers et formulaires et où s'agitent en tous sens une foule de bureaucrates. Cette scène, tournée dans une usine de farine abandonnée du Royal Victorian Docts à Londres serait, nous dit Gilliam, « un hommage à Stanley Kubrick, qui a utilisé ce genre de travelling pour traverser les tranchées du champ de bataille dans Paths of Glory. »
Sueurs froides, d'Alfred Hitchcock : le plan où Sam plonge dans le cercueil de Mrs Terrain ressemble en tous points à la chute de James Stewart dans Sueurs froides (Vertigo). Filmé contre un écran bleu troqué par le décor en post-production, ce plan répond une fois de plus au conflit entre le rêve et la réalité exploré par Gilliam.
Psychose, d'Alfred Hitchcock : la scène montrant Jill lors de l'arrestation de Buttle rappelle singulièrement la fameuse scène de la douche de Psychose, à plusieurs titres : Le décor, une salle de bain avec baignoire et carreaux blancs, est similaire, tandis que le personnage de Jill présente une certaine ressemblance physique avec celui de Marion Crane - elle pourrait en être une version dégradée. Dans le film que regarde Jill ("Les noix de coco" des Marx Brothers) on peut entendre une réplique "we have no vacancies ... but we've got plenty of rooms", qui pourrait être un écho de plus au contexte et aux dialogues du film d'Hitchcock. L'apparition d'une silhouette dans un miroir, et surtout la musique faite d'une répétition similaire d'accords stridents, complètent cette référence et hommage au maître du suspense. Les attentes du spectateur sont cependant détournées de manière presque comique, puisque ça n'est pas à la jeune femme que l'on s'attaque, mais à la famille vivant au-dessous.
Conflit avec Universal
La fin du tournage a vu un conflit entre Terry Gilliam et ses producteurs, notamment Sidney Sheinberg (à l'époque à la tête d’Universal), qui souhaitait des changements radicaux dans la structure du film. Gilliam explique : «Quelqu'un suggérait de finir le film lorsque Sam et Jill vont au lit ensemble, puis s'envolent vers le ciel... Un autre proposait de finir lorsque Sam et Tuttle font exploser l'édifice du Ministère de l'Information, ce qui aurait fait de Brazil un film de vengeance à la Rambo. Les gens d’Universal ne savaient pas ce qu'était Brazil. Ils ne comprenaient pas le film. Pour eux, l'important était d'enlever tout ce qui pouvait déranger le public, en fait, tout ce qui le rendait intéressant. »
Pris dans l'engrenage de la machine à profit hollywoodienne, le réalisateur se retrouvait à son tour assis sur la chaise de torture d'une tour à bureau prenant ironiquement les allures du Ministère de l'Information ; une mise en abyme où la réalité rejoint la fiction…
Ce conflit fait désormais partie de l'histoire du cinéma et est relaté dans le documentaire «The Battle of Brazil». Pressentant qu'une démarche juridique était vouée à l'échec, Gilliam engagea une véritable bataille médiatique au cours de laquelle il organisa des projections secrètes pour les journalistes, et acheta une pleine page dans "Variety" portant simplement le message : « Dear Sid Sheinberg, when are you going to release my film “BRAZIL”?» (« Cher Sid Sheinberg, quand allez-vous sortir mon film Brazil ? »)
Gilliam joue sur le double sens de release en anglais : à la fois libérer et sortir (un film)).
Les différentes versions
Le conflit avec Universal engendre trois versions différentes du film :
1- « Love conquers all »
La version des producteurs avec une fin heureuse, d'une durée de 94 minutes.
2- La version américaine
Gilliam décide de retravailler Brazil avant sa sortie américaine en décembre 1985 et lui donne une durée de 132 minutes. À noter que le réalisateur retient alors les suggestions de Sheinberg pour modifier le début et la fin du film. La version internationale s'ouvre sans musique. La première image n'est pas le travelling dans le ciel, mais le zoom out sur le moniteur de télévision. Il se termine avec Sam sur la chaise de torture et les murs gris de la chambre comme toile de fond. Sheinberg avait dit que la fin serait plus acceptable avec des nuages à la place de ces murs. Gilliam a donc acheté des plans de ciel du producteur de L'Histoire sans fin (Neverending Story) au cas où les siens ne fonctionneraient pas. Le mouvement était spectaculaire et Gilliam était d'accord avec ces deux changements.
3- La version européenne
La version jugée finale par le réalisateur, d'une durée de 142 minutes.
Source : plagiat d'une partie de cet article de Wikipédia
Et ça te laisse du temps pour lire les blogs des autres ? Il avait raison l'autre gugusse de la Meuse: " Y sont déja 10 millions, qu'on paye à rien foutre"...
RépondreSupprimerPJB> commentaire d'un intervenant qui en connait un brin sur la question. Tu ferais mieux de veiller à la discipline de ton établissement plutôt que de m'envoyer des liens montrant qu'on paye les fonctionnaires de police à faire de la luge avec leurs boucliers anti émeutes...
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