vendredi 6 avril 2012

Hémodynamique fœtale et troubles de l’adaptation néonatale




Avant la naissance, les poumons du fœtus ne sont pas fonctionnels et n’interviennent pas dans l’oxygénation du sang. C’est le placenta qui remplit ce rôle. Le sang oxygéné de la mère part au placenta et se mélange au sang « bleu » du fœtus dans sa veine cave inférieure, via le canal d’Arentius, avant d’atteindre l’oreillette droite. Peu de sang part vers les poumons. Grâce au foramen ovale (anciennement appelé trou de Botal) et au canal artériel, deux structures servant de shunts propres au fœtus, le cœur droit (avec son sang oxygéné en provenance du placenta) peut se déverser directement dans la circulation gauche en court-circuitant les poumons.

Ces deux structures provisoires permettent au sang oxygéné de passer rapidement vers l’aorte, puis vers le cerveau et tous les autres organes. Sans aucun bouleversement anatomique, le fœtus assume une fonction circulatoire complètement différente de celle du nouveau-né. Cette situation explique pourquoi la plupart des malformations cardiaques sont fort bien tolérées in utero : la circulation pulmonaire n’est pas existante et l’organisation ventriculaire n’a pas encore son importance puisqu’un seul ventricule (le droit en situation normale) suffit à  assumer la circulation du circuit ‘unique’.

A la naissance, le placenta est exclu brusquement de la circulation et l’enfant doit trouver d’urgence une autre source d’oxygène. La fonction respiratoire s’active et les alvéoles pulmonaires se déplissent pour remplir leur rôle d’oxygénation du sang et d’évacuation aérienne du gaz carbonique. Grâce aux premiers mouvements respiratoires expulsant le liquide amniotique résiduel contenu dans les bronches, les poumons et les vaisseaux pulmonaires acquièrent tout leur potentiel. Le surfactant sécrété en quantité et qualité suffisantes en direction de la surface aérienne des alvéoles peut jouer pleinement son rôle d’agent tensio-actif chez le nouveau-né à terme (ce qui n’est pas le cas chez le grand prématuré) en évitant celles-ci de se collaber. L’ampliation des vaisseaux engendre une baisse des ‘résistances’ pulmonaires, autrement dit, le sang y passe beaucoup plus facilement. Ceci permet une meilleure perfusion des poumons et amplifie l’oxygénation. Le sang oxygéné part désormais en grande quantité des poumons vers l’oreillette gauche, ce qui y augmente la pression et ferme mécaniquement le clapet que constitue la fente du foramen ovale. La circulation pulmonaire est installée et est définitivement séparée de la circulation systémique lorsque le canal artériel se ferme quelques heures plus tard, suite au passage d’un sang plus oxygéné qui induit le phénomène avec l’intervention de prostaglandines spécifiques locales. A noter que la baisse des ‘résistances’ pulmonaires, phénomène très important dans l’adaptation néonatale, se fait en grande partie à la naissance mais se complète encore pendant quelques semaines. 



La persistance du canal artériel

Le canal artériel est un petit vaisseau sanguin, reliant l'artère pulmonaire (celle qui va du cœur aux poumons) à l'aorte descendante (celle qui amène le sang oxygéné vers les organes du corps humain et  au cœur également par les artères coronaires). Normalement, ce canal se referme dans les heures qui suivent la naissance, mais il arrive qu'il reste ouvert.
Comme une partie du sang ne part pas en direction des poumons, selon l'importance de l'ouverture, il est possible que bébé ait des problèmes d'oxygénation insuffisante du sang (vous entendrez parler de saturation), et que le rythme cardiaque soit plus élevé que la normale, le cœur cherchant à compenser le problème.
- Si le problème n'est pas trop important, les médecins chercheront d'abord à provoquer la fermeture du canal, avec l'aide de médicaments. Le bébé aura par ailleurs un apport en oxygène un peu plus important, pour éviter au cœur de trop se fatiguer.
- Si le problème persiste, il est possible que les médecins décident une intervention chirurgicale, pour refermer artificiellement le canal. Ils utilisent pour cela une technique fine qui permet d'avoir une cicatrice de petite taille et une récupération rapide. Selon l'état de santé générale du bébé, et selon la taille de la "fuite", cette opération peut avoir lieu quelques semaines après la naissance, ou quelques mois. Après l'opération, on constate rapidement une amélioration de l'état général.

A noter : certains médicaments (en particulier les Anti Inflammatoires Non Stéroïdiens = AINS) pouvant entraîner une fermeture prématurée du canal artériel du fait de leurs effets antiprostaglandines sont proscrits durant la grossesse. Après la naissance, ces mêmes molécules peuvent favoriser la fermeture d'un canal artériel persistant.

La communication inter-ventriculaire (CIV)

Le foramen ovale, dénommé anciennement trou de Botal, est une communication physiologique présente entre les deux oreillettes durant la vie fœtale, et normalement appelée à se fermer après la naissance. La persistance d'un foramen ovale perméable est cependant observée avec une grande fréquence (9 à 35 % des adultes jeunes) et serait possiblement impliquée dans diverses pathologies, dont la survenue d'accidents vasculaires chez des sujets jeunes. L'appellation « trou de Botal » (actuellement désuète) fait référence au médecin piémontais Leonardo Botal (1519-1588), qui s'intéressa à l'anatomie et au rôle de cet orifice. Néanmoins, le foramen ovale a été décrit pour la première fois au IIe siècle par Galien.

Le foramen ovale en physiologie foetale

Chez le fœtus, ce foramen peut, par excès de taille, aller jusqu'à créer une communication entre les ventricules du cœur, et permettre ainsi à une partie du sang de passer directement du ventricule droit vers le gauche. Normalement, ce trou se referme à la naissance, lorsque bébé passe du mode de vie aquatique au mode de vie aérienne. Si ce n'est pas le cas, et que son diamètre est exagéré au point de mettre aussi en communication les ventricules (ou qu'une autre anomalie anatomique de communication du septum inter-ventriculaire soit présente), du sang va passer du ventricule gauche, qui contient le sang oxygéné devant alimenter l'ensemble du corps, au ventricule droit, qui est chargé d'envoyer le sang chargé de gaz carbonique aux poumons. Ceci a deux inconvénients :

- Le débit sanguin du cœur vers le corps est réduit, puisqu'une partie du sang retourne directement aux poumons.
- Les poumons reçoivent le sang à une pression supérieure à la normale, ce qui peut les endommager: Hypertension Artérielle Pulmonaire = HTAP.

La gravité de la CIV dépend de la taille du trou. 

Une petite CIV peut perdurer toute la vie du sujet, sans lui causer de troubles particuliers. Le cardiologue se contente de surveiller régulièrement ces enfants. Elle peut se refermer progressivement, au fil du temps (ce qui est le cas de la moitié des CIV, au cours des 4 premières années de vie).

Si la CIV est moyenne, elle n'entraine pas de défaillance cardiaque, mais ne guérit pas spontanément, il peut être nécessaire d'opérer vers 4/5 ans, si le débit pulmonaire est trop important (HTAP importante).

Si la CIV est importante, il peut être nécessaire d'opérer rapidement le bébé, ce qui sera généralement fait entre 3 et 6 mois. Si les poumons souffrent, il est nécessaire de pratiquer plus tôt une première opération de cerclage de l'artère pulmonaire, pour empêcher une trop grande quantité de sang de monter aux poumons.

Rappels de l'hémodynamique humaine après la naissance : animation Flash proposée sous licence CeCILL-B

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