samedi 16 février 2008

La grande illusion de la "der des der"



Mon fils aîné me demandait récemment quel était mon film français préféré? Quelques secondes d’hésitation... En pareil cas vous avez deux solutions: pour faire intello, sortir un titre exotique, introuvable à moins de connaître le dernier possesseur de ses bobines en voie de corrosion; passer pour un conservateur tristounet et bondir sur «un classique» unanimement encensé. Délai atteint. Choix de l’option deux: «La grande illusion» de Jean Renoir -1937.

J’ai du regarder ce film un nombre de fois pouvant justifier à lui seul l’invention des puissances de 10. Pas fanatique du tout des films de guerre, c’est pour moi un des rares avec « Apocalypse now » de Coppola qui sonde avec pertinence les abysses du délire humain légitimé, autorisant dans certaines circonstances le meurtre avec la bénédiction d’hommes de pouvoir peuplant ces profondeurs. Le film, d'ailleurs, ne propose aucune image de guerre. De nombreuses études et critiques ont été pondues sur l’œuvre de Jean Renoir, et sur ce film en particulier. Bien entendu, un de ses thèmes tourne autour de la tolérance dans un contexte qui s'y oppose. Oui, il explique la difficulté de s’affranchir des liens de classe, même si les circonstances le souhaitent pour le bien commun. Exact, peu de choses à redire quant au style, aux acteurs et à la qualité du montage. Evidemment, on se doit de louer les messages qu’il délivre… Mais... tout ne s’exprime pas avec de simples mots. Un «je-ne-sais-quoi» à la française, enrobé d'un nuage de tendresse parfumée, d’humour populaire, de sentiments forts et une touche d’aristocratie finissante donne à cette œuvre un charme peu commun. Tous ses personnages sont attachants parce que tous profondèment humains.
De manière très personnelle, je ne ferai mention que de la scène de la discussion entre Erich von Stroheim et Pierre Fresnay dans les appartements du chef de la prison citadelle. Elle a été tournée au Haut-Königsburg et constitue à mes yeux un des points d’orgue du film. Le pot de géranium entretenu avec soins et tendresse par l’aristocrate allemand, officier et directeur de la forteresse, seul symbole végétal apportant une note de poésie à cette immense salle parfaitement austère, réunit les deux hommes autour de lui. Avec une élégance qui "fleure" déjà une époque évanescente, ceux-ci discourent avec courtoisie et unissent peu à peu leurs points de vue. Ils se résignent à l’augure de la proche disparition de leurs idéaux ainsi qu’à celle de la classe à laquelle ils appartiennent. Elle les maintient solidaires malgré la guerre qui tend à les séparer. Un petit bijou. Chapeau bas, Monsieur Renoir.


4 commentaires:

  1. incroyable !!! tu ne me croiras pas, mais je m'apprêtais à poster exactement le même billet avec exactement la même séquence !!! Je venais juste d'extraire et d'encoder en flv précisément cette scène... Hahahaha ! L'effet est saisissant. Tiens, Pierre vient de poster un nouveau billet sur la mansarde, allons-y voir de quoi il cause. Vertige ! Il faut dire que la scène est somptueuse. Tout y est parfait : la posture d'aristocrate fin de race de Fresnay et l'accent déliçieux de Von Stroheim : "j'étais un combattant, maintenant je suis un fonctionnaire" (extrait d'ailleurs utilisé par Godard dans son (ses) superbe(s) "Histoire(s) du cinéma"). Synchronisme parfait !

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  2. Proc> et moi ce court addendum qui en fait restera en commentaire:

    Les liens « You Tube » ou « Daily Motion » ont la fâcheuse tendance à la volatilité. Parfois vous aimeriez conserver plus de robustesse à vos liens en hébergeant vous-même l’extrait vidéo si celui-ci n’a pas de copyrights. Je vous signale deux liens utiles :

    - http://keepvid.com/ ce site vous permet de télécharger sur votre ordinateur la vidéo souhaitée sans installation d’un programme quelconque.
    - http://www.smallvideosoft.com/ fournit un outil gratuit pour la convertir aux formats AVI MPEG ou VMW si le fichier en question possède l’extension FLV (format vidéo utilisé par Flash) vous permettant alors de l’éditer à votre convenance dans « Windows Movie Maker » par exemple et de modifier à souhait son taux de compression.

    Synchronisme tout à fait étonnant, j'en conviens !!

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  3. Je reconnais bien Pierre avec sa minerve, Procrastin, en revanche, a beaucoup changé...

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  4. Ali Bigoude> les implants capillaires peut-être pour Procastin ??

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