mardi 11 novembre 2008

Vieux motard que jamais !



Durant la période hyperactive de ma vie où je jonglais avec les casaques de jeune père de famille, président d’une Maison des Jeunes, étudiant en Médecine, membre de plusieurs associations sportives, la folie m’a pris d’en endosser une de plus: celle de l'imprésario véreux d’un groupe musical qui terrifia un temps par sa puissance de feu et ses représentations cacophoniques quelques évêchés de l’est de la France. C'est un concert ponctué par un pugilat d’anthologie qui sonna le glas des représentations. Durant celui-ci, totale inconscience de ma part, j'avais fendu le champ de bataille pour monter sur scène et m'emparer d'un micro. Plein d'illusions juvéniles, je souhaitais calmer la foule contrariée par la défection (il n'y a qu'un "a" de résignation qui m'a empêché d'écrire "défécation" ..) d’un groupe à l'affiche de la soirée. Ma souplesse reptilienne m’avait permis d'éviter les canettes de bière décochés par quelques spécialistes d'un lancer pas encore homologué en athlétisme. Cette scène a été honteusement repiquée dans le film des Blues Brothers, mais eux, jouaient à l’intérieur d’un poulailler grillagé barrant les projectiles…

Autre inconscience coupable, au vu des troubles publics qu’engendraient le groupe au premier accord plaqué, son inscription à une session du célèbre mais désormais défunt Golf Drouot de Paris, un soir de février de l'an de grâce 1980. L’établissement baissa le rideau de fer peu de temps après notre passage. Les experts n’ont pas tranché: la relation de cause à effet n'était pas indiscutable. Je pense cependant - je cite le nom du groupe pour soulager ma conscience - que BAD PROPANOL y était tout de même pour quelque chose. Cette assertion n’engage que moi, bien entendu, et mon psychiatre qui m'a exhorté à verbaliser mes traumas.

Fin des digressions. En Lorraine, le mois de février peut s’avérer légèrement «frisquounichet». La nuit qui précéda notre départ pour la capitale - prévu en utilitaire "Pigeot" - d’abondantes chutes de neige s'ingénièrent à faire capoter ce projet hardi. Mais les Argonautes en avaient vu d’autres. Pour honorer le contrat, ils prirent la décision héroïque de recourir aux services de la Société Nationale des Chemins de fer Français, appelée plus communément SNCF. Malheureusement, ils durent abandonner au départ la quasi-totalité de leur matériel de musique. Impossible de le transbahuter dans le train et le métropolitain. Ce dernier est appelé vulgairement métro par le parisien pressé, même en mode locutif.

Nous voyant arriver les mains dans les poches, Henri Leproux, le directeur du Golf Drouot, avait accusé le coup. D'un stoïcisme que n'aurait pas renié Zénon de Kition, il laissa tomber: « Je m’attendais bien, un jour ou l'autre, à ce que des martiens viennent jouer chez moi ! ». 

La franche camaraderie des baroudeurs du spectacle servit Dame Providence. Un des groupes à l'affiche nous proposa une partie de son matériel contre deux Carambars. La prestation du groupe fut somme toute honorable puisqu’elle lui permit de ne pas finir dernier du classement de la soirée. Le jury craignait probablement des représailles. La musique punk en acier trempé émise durant le Blitz Bad Propanol avait du faire réfléchir les officiels. Henri Leproux, lui, montra sa capacité à faire feu de tout bois. Il vint trouver le chanteur à l’issue du spectacle pour faire cette proposition au groupe : « Je recherche en ce moment un groupe musical pour faire de la figuration dans un film. Votre jeu de scène est particulièrement spectaculaire. Un doublage musical serait tour de même judicieux. »


Souvenirs… Souvenirs...

L’histoire aurait pu s’arrêter là. Il y a quelques jours, remettant à niveau mon espace d'hébergement Internet qui abrite courageusement quelques pages HTML dédiées à Bad Propanol, je souhaitais insérer un lien proposant un petit historique du Golf Drouot, celui-là qu'on peut cliquer ici sans risque. Un lien courriel du site proposait d’adresser des photos de groupes ayant joué dans l’établissement. J'ai pris l'initiative d'entrer en contact épistolaire électronique avec son gestionnaire, Jacques Mercier. Cet homme fort courtois m’a répondu rapidement et a inséré une photo d’archive au milieu de la saga de groupes prestigieux, ou non, ayant officié dans les murs de la vénérable institution. BAD PROPANOL s’y trouve désormais à la gallerie 4.

« Il faut bien de tout pour faire un monde, ma brave Dame... ».
*
Merci à Jacques dont la carrière de musicien et d’accompagnateur bien remplie (Charles Trenet, Michel Polnareff, etc.) l’amène toujours à faire partie d’un groupe. Il a laissé une trace officielle de Bad Propanol dans la saga du Golf Drouot. Tardive, certes, mais sans rancune pour son passage cataclysmique qui toucha cruellement la rue Drouot au début de l'année 1980.

Eh oui! Vieux motard que jamais...

Note :
Lien vers YouTube . Il vous propose Faust 72 interprété par Jacques Mercier et Dynastie Crisis, sorti l’année du même nombre. A noter que cette musique fait partie de la bande son du film «Ocean’s Twelve». On entend aussi sa voix dans quelques dessins animés longs métrages très connus de Walt Disney. Les dingos dans notre genre, ça ne lui fait pas peur...

Les liens ayant tendance parfois à être volatiles: remise à niveau de ceux-ci le 03/04/2015

3 commentaires:

  1. Quand je pense qu'on aurait pu s'appeller Gasoline ou Caisse à clous ...

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  2. Ou les "Schtroumpfs", les "Rolling Stones", pôôô possible des noms pareils... Tu me diras "Gasoline" vaut bien "Bad Propanol" pour un moteur à explosion.

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