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mercredi 23 juillet 2008

BLOW -UP

Highslide JS

«Notre drame, c’est l’incommunicabilité qui nous isole les uns des autres. Sa permanence nous égare et nous empêche de résoudre les problèmes par nous-mêmes » - Michelangelo Antonioni

Michelangelo Antonioni, cinéaste de l'incommunicabilité. Ses propos vont dans ce sens. Il aborde souvent des sujets exprimant en profondeur les inquiétudes et angoisses de ses contemporains. Inquiet et méticuleux parfois jusqu’à l’obsession, le rythme de ses montages jouant fréquemment sur la lenteur décourage le grand-public. Avec Blow-up, film italo-américain récompensé par une palme d’or à Cannes en 1967, il obtient cependant un succès commercial. Ce film est d’une grande modernité à sa sortie. Beaucoup de cinéphiles soulignent l’importance de l’apport de son cinéma dans la deuxième moitié du XXème siècle.

Le véritable sujet de Blow-up est la découverte du caché derrière l’apparence, des voies de passage entre réel et fiction, vécu et imaginaire. Platon, dans sa métaphore de la caverne, proposait d'abandonner le spectacle trompeur des ombres projetées sur la paroi, de se retourner pour découvrir leurs sources extérieures réelles. Antonioni fait accomplir à Thomas le photographe de mode, personnage principal du film, le cheminement inverse. Il lui propose de s'affranchir du monde professionnel de la photographie des «swinging sixties», moyen de production, de fabrication d’images, d’icônes publicitaires dont Thomas paraît blasé, pour entrevoir la capacité d’enregistrement, de témoignage et au final de création artistique de son médium. De voyeur fébrile, il est amené à devenir observateur attentif et patient.

Au départ, Thomas n’a rien vu. Pourtant, en agrandissant des photos prises secrètement d’un couple amoureux dans un parc, il découvre l’élaboration d’un crime. La technique photographique supposée l’aider à «révéler» le mobile du « meurtre dans un jardin anglais » ne fait que l’égarer dans son enquête, aux trousses d’une femme insaisissable. Balloté d’incertitudes en incertitudes il est initié à son insu à la véritable création artistique. L’agrandissement final est un tirage pointilliste proche des tableaux abstraits de son ami Bill dont il admire le travail.


"Blow-up" est aussi un reportage esthétique sur le Londres des années soixante. On y retrouve ses modes, ses musiques, ses fêtes et «happenings», son culte de l’amour libre prôné par la jeunesse. Thomas, contraint par son métier de photographe de mode à vivre dans l'instant, échappe peu à peu à son univers de papier glacé en faisant entrer l'éprouvé et la réflexion dans le temps de la prise de vue. Antonioni montre que l'image publicitaire possède un érotisme froid et qu'il utilise dans sa conception des jeux pauvres en émotions, véritables pantomimes de la séduction. Ayant pris le temps de la réflexion, comme Bill, le peintre abstrait, il finit par comprendre ses propos face à un de ses tableaux qu’il refuse de lui vendre: "Quand je l'ai peint, il ne voulait rien dire [...] Et puis plus tard je trouve des choses. Et tout à coup ça s'éclaire tout seul".


Tel est probablement le sens du son de balle que veut bien percevoir Thomas à la fin d’une autre pantomime, celle de la partie de tennis muette qui clos le film: l’acceptation d'un son imaginaire suggère peut-être sa décision d’inclure plus de mystère dans sa création. L’enquête policière perd alors tout intérêt, au point que le spectateur à la première vision du film finit, comme Thomas, par ne plus savoir si un crime a eu lieu véritablement.

La toile fond vert où Thomas est absent dans le générique d’introduction du film, finit par l’absorber dans le final, son arme photographique à la main signant l'union du réel et de l'imaginaire. Un tireur photographique embusqué dans la verdure remplace l'autre.

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mardi 15 juillet 2008

Larmes d'obsolescence

Dans le courant du week-end, une larme a perlé au coin de mon œil gauche, troublant quelques secondes ma vision binoculaire. J’effectuais probablement l’ultime mise à jour de mon système d’exploitation: «Windows XP». Quelques frissons d’angoisse pendant l’installation du Service Pack 3. Un message d’erreur sans conséquence. Après nettoyage, tout fonctionnait au poil. J'entendais sonner le glas d’un O.S. (variation anglaise pour éviter les répétitions = Operating System) d’une grande stabilité par rapport à ses prédécesseurs dès l’apparition du Service Pack antérieur (le 2 pour ceux qui ne savent pas compter à rebours). L’apport d’un pare-feu personnel y participait. Le règne de Vista avait débuté quelques mois plus tôt. Son interface gourmande «bling-bling» et quelques modifications ergonomiques du bureau désespéraient déjà les esprits routiniers. Malgré des retards successifs visant à la sortie d’un système d’exploitation sans faille, un Service Pack 1 sorti dans l'urgence (on s’y perd) gomma à la hussarde les premières doléances publiques. A peine en service – si l’on peut dire- on était déjà reparti dans les mises à jour !

L’époque glorieuse des systèmes d’exploitation en mémoire morte avait pris fin dans les années 90. Sur mes premiers ordinateurs, j’appuyais bêtement sur le bouton «Marche» et dans les 3 secondes qui suivaient, ma machine était opérationnelle. Le choix d’un système installé sur un disque dur à partir d'un CD-ROM, suivie d’une mise en place mémoire progressive en période d’ouverture augmentèrent considérablement la consommation de café des utilisateurs. Le temps des attaques virales et des conflits d’installation explosant votre belle architecture était en marche. Ce qu’on gagnait en flexibilité relative des machines, on le perdait en stabilité et robustesse du système. J’ai employé l’adjectif «relatif», car c’était parti aussi pour la valse musette des cartes-mères, microprocesseurs, cartes graphiques et j’en passe du coté «hardware» avec leurs partenaires du «software», les logiciels, ne fonctionnant plus suite aux évolutions successives du matériel et des versions nouvelles du système d'exploitation tombant à une cadence infernale. Le consumérisme tournait plein pot demandant peu à peu l’achat de machines de guerre dont on exploitait une partie infinitésimale des capacités tout en accroissant ses factures d'énergie et la part du budget informatique des ménages. Faire du traitement de texte et procéder à l’envoi de courriels avec des monstres de technologie surpuissants est à la mode. Vous me direz qu’on peut désormais «fragger» * de manière furieusement réaliste avec les jeux 3D du moment et observer l’anatomie viscérale des ennemies qu’on a éventrés de façon parfaitement détaillée et spectaculaire.

Bon, j’abandonne ce combat d’arrière-garde de vieux con contre le progrès qui ne va jamais sans dégâts collatéraux comme disent les adjudants et me demande résigné quand je vais être amené à lancer les devis pour l’achat d’une machine tournant sous Vista, forcé par l’obsolescence progressive de mon matériel et les contrariétés corollaires que le marché m’impose à son grand bénéfice. C’est vrai que lorsque j’utilise une calculette, je ne pleure pas les bouliers. Quoique...

Billet connexe

* Le jargon français

Fragger
/fra-ge/ vt.
[jeu] Tuer un de ses adversaires dans un jeu de baston, c.-à-d. le réduire en fragments plus ou moins ragoûtants à l'aide d'armes diverses telles que lance roquette, BFG (Big Fuckin’ Gun), shotgun... On marque alors un frag (Xavier Belanger).