jeudi 10 mars 2011

Préhistoire contemporaine


L'ENIAC. Je ne suis pas présent sur la photo...

L
e Français est râleur et fait souvent preuve d’un conservatisme irritant. Par bonheur, il sait parfois rapidement combler le retard qu’il a pris suite à des combats d’arrière-garde dilatoires visant à repousser la soi-disant invasion d'une nouvelle technologie.

Dans les années 80, je fus convié par l’institutrice de mon fils ainé à intervenir dans sa classe de CM2 pour donner aux élèves quelques éclaircissements sur le fonctionnement des ordinateurs domestiques «made in pas France» qui commençaient à faire leur apparition sur le marché national. Notre bon pays campait sur l’incontestable suprématie de son Minitel. Il s’agissait avant tout de définir en termes simples quelques mots barbares employés par les nouveaux adeptes de ce qui allait devenir par la suite le Personal Computer. Microprocesseurs, périphériques, mémoires de stockage, mémoires vives, mémoires mortes, langages informatiques du moment (souvent le BASIC pour le grand-public) permettant de piloter un outil dont les puces simplettes n’entendent et ne s’expriment qu’en mode binaire: "0", le courant ne passe pas quelque part, "1", le courant passe quelque part, pour faire simpliste et parler puce.

Pour ce, j’avais déménagé du bureau de l’appartement mon matériel informatique digne, à l’heure actuelle, de figurer dans un musée. N’oublions pas cependant que les grands principes de fonctionnement sont restés les mêmes bien que les technologies aient permis d’effectuer des pas de géants dans tous les compartiments évoqués. Ce que j’imaginais durant l’heure qui m’était consacrée? Une pagaille monstre, des questions baroques, maints regards éperdus en direction des fenêtres dans l’attente de la sonnerie, et, plus inquiétant encore, potentiel lynchage de l’intervenant expulsé de la classe, au mieux, enrobé de goudron et couvert de plumes. Que nenni, les élèves, filles et garçons, avaient montré un grand intérêt pour l’usine à gaz et son embrouillamini de câbles trônant sur le bureau de l’institutrice. Par soucis de vérité, il faut admettre que le point d’orgue de la séance fut la démonstration de quelques jeux informatiques présents sur la machine.

Il est bon de rappeler qu’à cette époque l’homme de la rue vilipendait ce phénomène de mode microcosmique agitant tout au plus quelques professeurs Nimbus dans un recoin de garage. On prédisait à cet outil folklorique une mort foudroyante au vu de son intérêt quasi nul à améliorer ce que l’on pouvait faire alors bien plus vite avec un cahier et un crayon à papier (pas de papier). Monsieur Jourdain faisait pourtant déjà de l ‘informatique sans le savoir avec sa carte bleue, bon nombre des programmateurs de ses appareils domestiques, l’utilisation de certaines fonctionnalités d'automobiles modernes et oubliait que l’homme était allé crapahuter sur la lune aidé par des ordinateurs dont la puissance monstrueuse est dépassée par la moindre calculette scientifique actuelle.

Désormais, piquez son téléphone cellulaire à un gamin, verrouillez son portable, supprimez les distributeurs automatiques de billets dans les gares, enlevez l’informatique embarquée des véhicules récents, imposez le retour aux tubes cathodiques, la liste s’allonge de jour en jour, le peuple va se soulever pour reconstruire la Bastille. L’outil informatique est encore loin d’être parfait et son utilisation simplissime, mais, même les plus rétrogrades doivent convenir qu’il est sorti du garage au fond du jardin et s’est imposé dans la maison au point qu’il serait peu imaginable qu’on puisse l’en déloger.

Une fois de plus, il ne s’agit pas de savoir si certaines avancées technologiques sont un bien ou un mal, seul leur mésusage peut prêter à critiques négatives.

Billet connexe: Le Dragon 32 qui pète le feu

3 commentaires:

  1. Tout progrès, technologique entre autres, est voué à l'échec tant que le nombre de ses détracteurs est supérieur à celui de ses admirateurs... et je ne pense pas que ça changera un jour !

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  2. bonjour,
    création d'un blog sur l'art, bienvenue.

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  3. De Ni> c'était du coup mal parti à l'époque évoquée en France pour l'ordinateur domestique. Quant au "hardware", les Chinois illustrent le fait que s'engager en retard dans la concurrence n'est pas forcément un handicap insurmontable. Dans le domaine de l'Internet, les Français n'ont pas trop mal réagi. Combat d'arrière-garde rémanent concernant la numérisation des bibliothèques, histoire de perdre une bataille de plus pour un pays qui ne représente qu' 1% de la population mondiale. Faudrait bien finir par le comprendre !

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