vendredi 5 décembre 2008

Pandore est au piano mais Pan dort.



Mauvaise éducation, sans doute, je ne parle jamais politique ni argent à table. Je pense que c’est un manque de respect total pour la nourriture qu’on consomme. Mes élucubrations se voulant post prandiales, il m’arrive de temps à autres de tousser dans un billet abordant, en douce, le premier sujet évoqué. Ce n’est pas une envie d’appliquer le poncif, m’occuper de politique avant qu’elle ne s’occupe de moi qui a engendré celui-ci. Je laisse les politiciens à leur foire d’empoigne et la politique s’occuper de leurs yeux au beurre noir. Quelques histrions de la famille, gonflés d’importance, comme le batracien de la fable, n’imaginent pas sans doute un instant le spectacle pathétique qu’une fausse manœuvre sur la télécommande inflige au téléspectateur qui les voit au passage d’un débat parlementaire. Les quintes de toux que j’émets en écrivant ce billet sont dues ce soir aux pneumallergènes véhiculés par quelques vents mauvais ou copieuses flatulences émanant de ce microcosme qui se croit sérieux et responsable alors qu’il fourmille de collégiens en mal d’image jouant consciemment ou inconsciemment aux apprentis sorciers. Depuis quelques temps, les orientations autoritaires prises par certains de leurs casse-cou me font penser qu’ils ont invité le diable à leur table. Munis de leurs grandes cuillères ils se disputent les rogatons de la boîte de pâté frelaté de Pandore qu’il leur a offerte en pitance: variante de la jarre initiale du mythe grec. Qu'importe, le diable, c'est bien connu, sait faire feu de tout bois… Il me semble que, sournoisement, profitant du bouillon de crise qu’on maintient habilement à feu doux, certains politiciens, mine de rien, sont prêts à nous mitonner la bonne vieille recette de la dictature. Pour faire une bonne dictature, il n’est pas nécessaire de se lever de bon matin. Le vieux pot du mécontentement populaire est à portée de main pour y faire la meilleure des soupes possible.

Personnel en cuisine politique suggéré à ces enragés :

- Un Maître Saucier es Propagande et son équipe de marmitons maniant à la louche la désinformation, piquant les bas instincts populaires et faisant entrer dans la composition de leur mayonnaise une bonne dose de mots clefs populistes bien faisandés. Leur fouetté de main professionnel montera en neige, en un éclair (au chocolat éventuellement), un organe de presse parfaitement noyauté capable de concasser tout médium d’opposition. Ils affectionneront les sabayons médiocres et les sirops moralistes dans lesquelles flotteront à plaisir le journalisme télévisé du moment et les présentateurs grand-public de nos chaînes, comme de peu ragoutantes iles flottantes.

- Un Grand Inquisiteur Magistrat abricotant la censure et bridant les libertés. A ses temps perdus, il pourra blondir les sceaux. Il saura raidir le phantasme de l’insécurité et nous pondre des lois liberticides qu’il imposera aux magistrats, babas, voyant partir en fumée leur belle indépendance.

- Un Conseiller en Image et Communication Cyniques épaulé par des politologues onctueux pouvant pousser l’exercice de leur art jusqu’à décrire aux médias saisis à feu vif et un auditoire restant comme deux ronds de flanc, la méthode employée par Le Grand Chef pour farcir et monter au beurre la dinde électorale tout en lui faisant payer la motte en pommade. Une ancienne mère maquerelle devenue présidente de ligue de vertu, comme toute vieille morue qui se respecte, pourrait parfaitement faire l’affaire en salle. Elle sait comment flatter les goûts du client et braiser leurs perversions à couvert. Un publiciste, ce n’est pas mal non plus pour clouter nos oignons. Qu’on martèle à l’envie que se sont les temps modernes qui imposent d’en passer par là, sera l'incantation de la caste saprophyte soucieuse, on le comprendra, de gaver la poule aux œufs d’or pour faire choux gras.

- Un Grand Argousin de la Répression rompu à la chasse aux sorcières, maître veneur, expert du rabattage des boucs émissaires jetés en pâture aux innocents martyrs constituant le gros de la volaille. L’incarcération massive d’opposants et de lampistes, service minimum auquel il serait astreint. Incarcérer des lardons de douze ans, après avoir agrafé à leurs oreilles leur fiche signalétique de traçabilité dès la maternelle, serait une bonne recette au fumet rance d’eugénisme d'antan pouvant aviver le palais des plus intégristes.

- Un Alchimiste de la Cour versé dans la confection des purges radicales dédiées aux conspirateurs internes avérés ou potentiels. Qu’il avoue ouvertement que l’homme au sommet de la pyramide a pu y parvenir suite à un travail acharné et approfondi à l'officine des poisons: seule méthode infaillible pour devenir champion de la peau de banane et du pic à glace planté dans l’entrecôte des opposants ou des alliés trop compétents. Un risque, faire monter la moutarde au nez de l'électorat ou laisser perplexe sur la qualité de la viande. Il sait cependant que le peuple est prêt à tout entendre, même la vérité. Il affirmera, en cas de besoin, que les lacunes dans le domaine du calcul mental de nos politiciens ont fait préférer ce critère d’élevage. Seules, les mauvaises langues, prétendent que cela explique également leur propension à mal calculer leurs dépenses sur les marchés couverts ou non, mais ils savent parfaitement proposer au peuple la galette ou l’oseille qu’ils n’ont pas, devra-t-il ajouter.

- Le Grand Mécène des Arts et de la Culture contrôlera impitoyablement la qualité des marchandises de luxe et limitera leur accès au personnel en tenue blanche pour éviter l’apport de germes fécaux propres à de potentielles remises en cause émétisantes, à des questions pertinentes mais foireuses et aux débordements diarrhéiques, donc incontrôlés, des fous du Roi, nos humoristes. Il doit remettre à la mode les grands barbecues conviviaux que sont les autodafés. Il imposera l'image pieuse de Saint Epvre accrochée au mur en cuisine. Le Grand Conducteur a besoin de Dieu, c'est Stendhal qui l'a dit, alors... sorte d'alter ego pour appuyer ses commandements. Pour ce, ne pas hésiter à bourrer le chinois des sujets. Eh là! attention, toutes les métaphores ici sont culinaires, je précise pour éviter tout dérapage imaginatif.

- Le Maître-Queue, cordon bleu blanc rouge, petit père du peuple, devra incarner l’image du père solide, sévère mais sachant récompenser les délateurs et les serviteurs zélés. Le moindre fait divers lui offrira une tribune pour éructer de nouvelles directives improvisées, lancées à la sauvette, sans concertation ni recherche de faisabilité. Discours interminables fourmillant de vœux pieux, de promesses sans lendemain. Quelques phrases pompeuses au lyrisme ronflant alternées avec des odes grandiloquentes et racoleuses pourront aller sans crainte jusqu’à la mièvrerie. Il faut laisser entrevoir que sous son masque d’homme de fer, le Grand Vizir, reste avant tout un grand sentimental, ami du genre humain. Il prendra des postures photogéniques de Grand Timonier tenant fermement le gouvernail du galion de la nation au milieu des tempêtes, sur fond de musique wagnérienne. Pointer du doigt l’Eldorado de carton pâte qui se profile sous le plus beau des ciels d’opérette qui soit, constitue également une belle attitude. Sa puissance et son rang lui imposeront de se présenter au peuple qui le vénère dans des tenues d’apparat indiquant qu’il use avec discernement des fruits de la dîme et de la gabelle. Porter au poignet un chronographe de prestige peut « le faire ».
"Citoyens, si vous pensez qu'on vous prend pour des pommes et qu'on vous retourne dans la farine, sachez que c'est pour votre bien: faire une bonne tarte tatin", pourrait être une phrase magnifique ponctuant un de ses discours. "Plus ça baigne dans l’huile ou la mélasse, plus ça passe facilement… alors, pourquoi s’en priver.", pourrait en conclure plus d'un.

Bon, en parlant de conclusion, l’heure est venue de prendre une bonne cuillère à soupe de sirop antitussif pour me garantir une nuit vanillée. Après tout, certains diront qu’il n’y a pas de quoi en faire un fromage ou sortir de sa coquille, au beurre d’ail, s’entend.

Les personnages et situations évoqués dans ces élucubrations dyspeptiques sont de pure fiction et toute ressemblance avec des personnages ou situations réels ou ayant existé ne serait que pure coïncidence ou fruit de votre imagination chafouine.

2 commentaires:

  1. Hello Dolly> Par Acétamol! Un antitussif, un bon grog, deux cachets dont vous êtes la spécialiste et une petite poussée de paludisme délirant à l'écriture de ce billet m'ont remis d'aplomb jusqu'au prochain sujet politique bancal susceptible d'entraîner une rechute. J'attends avec impatience un commentaire de Corinne Athiol.

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